Musiques anciennes : Haendel, « Enchantresses »
Le dimanche 1er octobre, à 20 heures, la soprano Sandrine Piau s'associe aux Paladins pour incarner les héroïnes tragiques et les magiciennes « enchantresses » des plus grands opéras de Haendel.
Magiciennes et sorcières ont souvent inspiré les opéras de Haendel (1685-1759). Tout au long de sa carrière, le compositeur a multiplié ce type d’héroïnes qui incarnent la lutte inlassable des femmes pour la conquête d’un pouvoir confisqué par un ordre social fondé sur les lois du patriarcat. Sandrine Piau déclare à ce sujet : "Par leur audace et leur envie de ne pas être cantonnées à leur position de femmes faibles, elles vont gagner un pouvoir et vont vivre et mourir de façon tragique, la plupart du temps. Elles paient cher, comme Icare va paye cher son envie d'échapper à la condition humaine et de voler". Cet antagonisme inspire des arias (airs) tour à tour virevoltantes, vengeresses, fébriles ou langoureuses qui explorent parfois à l’extrême la panoplie des affects de l’opera seria baroque (l’opéra aux sujets héroïques et mythologiques, traités sous le mode de la tragédie).
Toujours excessives, ces redoutables magiciennes qui ensorcellent le cœur des hommes, font d’eux leurs amants, les transforment ensuite en animaux ou en statues de pierre, sont l’occasion pour Haendel et la troupe du King’s Theater ou du Théâtre de Covent Garden d’expérimenter des effets spéciaux prodigieux. Sur scène, ces théâtres recourent à des machineries ingénieuses et sophistiquées qui soulignent l’enchantement général de ces personnages féériques.
Le monde des incantations n’a cependant qu’un temps… L’ordre doit triompher dans la pensée rationaliste du XVIIIe siècle, ne pouvant tolérer les excès de ces femmes aliénées aux forces du mal : dans Alcina par exemple (la dernière partition dans laquelle Haendel exploite le thème de la magicienne), le cortège des illusions s’estompe au fil des actes, l’héroïne principale perd à la fois ses pouvoirs et son combat contre le couple de mortels que forment Ruggiero et Bradamante : de modestes humains finissent par vaincre les puissances trompeuses de la magie.
À travers des extraits de Lotario, Giulio Cesare, Ariodante ou encore Alcina, la soprano française Sandrine Piau, figure majeure de la musique baroque et interprète incontournable de Haendel, explore, le dimanche 1er octobre, à 20 heures, toutes les facettes de ces héroïnes déchues au caractère bien trempé lors d’un concert exceptionnel à la Salle Philharmonique. Pour l’accompagner dans cette galerie de portraits incandescents, elle retrouve ses complices de toujours, le chef Jérôme Corréas et son ensemble Les Paladins (pour la première fois à Liège) avec lesquels elle a enregistré ce répertoire pour le label Alpha Classics (2022).
Un concert coproduit avec le Festival Les Nuits de Septembre.